8.12.11

1152. Poussière

Ça me fait bien drôle de me présenter ici à nouveau.

Je sens venir en moi encore de la malveillance, de la méchanceté.

J'ai connu l'expérience et elle ne m,a pas servi. Ces temps-ci, je me figure que je suis complètement seul et que je n'aurais qu'à faire du mal pour passer le temps.

Du mal auprès de mes proches.

***

Qu'est-ce que tu veux faire plus tard, François?

"Chauffeur d'autobus!"

J'ai dû regarder la vieille cassette VHS de mon homologue à huit ans des dizaines de fois.

Je me demande bien ce que la vie aurait fait de moi si j'avais fini au volant d'un autobus. Les chauffeurs que je connais sont sociables, avenants et plutôt heureux.

J'ignore moi-même quel évènement a fait de moi un nerd consacré. J'ignore quand j'ai pris conscience de mon choix. J'ignore pourquoi je porte un chandail de Spider-man en écrivant ce texte.

J'ignore pourquoi je préférais les monstres aux sports, les livres aux drogues, les écrans aux filles. J'ignore pourquoi j'ai un complexe d'infériorité. j'ignore pourquoi j'écris; c'était naguère pour séduire, maintenant c'est dans le vide même.

***

Que, sonne, sonne le glas, que sonne, sonne le glas.

***

Ce qu'il y a de surprenant, c'est qu'on peut écrire n'importe quoi, au fond. Râper mes crises existentielles, c'est le sauf conduit assuré pour pianoter sur le clavier, tranquillement.

Un nerd, vraiment? Comment ils évacuent leur violence, les autres, alors?

Ils ont beau l'évacuer, ils demeurent intrinsèquement violents, non?

Tenez, alors que j'écris, je me convaincs que j'accomplis quelque chose de grand, alors que les mots en soi ne renvoient que le reflet de mon intention. Ils ne sont que structure primitive, un châssis sommaire qui prétend se mouvoir, mais qui meurt bien vite.

Écrire n'importe quoi.

Ça donnerait sans doute le meilleur livre possible: une série d'emprunts, des vantardises, des échecs, des contemplations. C'est tout ce que ma tête contient.

***

À présent que j'ai un travail suffisamment honorable pour qu'on évite de me regarder de biais, je m'inquiète sur ma substance et mes paris.

Ça n'a pas trop changé, le plancher est en bois franc, mon processeur est doublement performant et les accès ont changé, mais pour l'essentiel je ne suis qu'un traîne savate sans histoire, qui se pixellise de plus en plus.

C'est vrai!

Je sens que mon corps se transforme en petits carrés électriques. Mes yeus me picotent, mon corps se voûte en une brique raide, mes articulations grillent. Lors de ma marche quotidienne, je calcule le tableau bidimensionnel qui charcute mon corps par petits dividendes courbes.

Ai-je vraiment passé à côté de quelque chose?

C'est quoi, ma mission, dans la vie?

Pourquoi je suis là, décrit dans ce texte?

J'en ai mal à la tête, si vous saviez. J'hésite à courir après ma queue, je suis indéfini, brouillon.

C'est quoi, la quête des parvenus?

Répondez-moi!

Existez-donc!

Merde!

Merde!

D'habitude, j'ai quelqu'un de bien qui me pousse dans le dos. La vie m'a habitué à un mentor, quelqu'un de réconfortant, d'enviable. Au mieux, un rival.

Ces temps-ci, je n'ai que moi-même comme référence, et je n'en tire pas grand chose.

L'hiver s'est installé. Ça faisait longtemps qu'il bluffait. Je deviens irascible avec mes amis, mes meilleurs amis.

J'ai encore de la misère à trouver une raison pour me lever le matin. Au mieux, pour prendre une inspiration.

J'aspire à une ligne droite.

Mais je ne peux pas me résoudre à la poussière.

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