Une rage galopante, où les plus horribles pensées poussent, pointues et fastes, décuplant mon inspiration et ma verve.
Ce blog est curieusement aseptisé.
Il n'a aucun intérêt.
Il n'a aucune pertinence.
L'éloge creuse de la vacuité et du pathétisme.
Je me rappelle, étant plus jeune, avoir fait lire mon journal intime d'époque à mon grand-père maternel. J'y avais écrit des secrets, que j'ai pris la peine d'effacer à la hâte avant de lui remettre tout fier le cahier.
J'avais huit ans, mais du haut de mon orgueil je voulais que grand-papa sache que le petit François vivait sa vie, la narrait fièrement.
Alors qu'il lisait, j'étais persuadé qu'il lorgnait les cursives hasardeuses d'un oeil distrait, il y avait beaucoup d'invités dans la pièce. Je me sentais indigne, menteur. Je cherchais une lueur de compréhension dans ses yeux, mas je les devinais las. Personne ne comprend, car tout est muselé, par ma faute.
Ce fut le début de ma honte.
Je verrouillerai aussi le décompte, sinon je n'écrirai plus jamais. Je veux faire des attaques ad hominem, je veux, sans limites, me placer au-dessus des autres, sans votre rhétorique contraignante, je veux souhaiter la mort de mes proches, je veux écraser lentement le visage d'un humain sans importance sur un papier sablé, et frotter jusqu'à ce que le tronc cérébral poigne.
Je veux noyer cette engeance poilue dans ma propre urine, en lui brisant le cou, et apprécier l'odeur salée de ma pisse en besognant.
Je veux tuer des déficients intellectuels. Surtout les plus bruyants.
...
L'idée du papier sablé me semble la meilleure. Un extrait.
"On dirige la tête vers le médium. On y pose le nez, et alors que le va-et-vient commence, une partie de l'épiderme s'effrite, le bout rosit. On continue le frottement, régulier. La pointe du nez commence a saigner, laissant un trait mat sur la surface rude. En frottant plus fort, les ailes s'écrasent et s'entament aussi. Le trait mat gagne en largeur. On sent une raideur, c'est l'os du nez qui creuse le papier, créant une déchirure distincte au milieu de l'imbibé rouge.
Pause. On rassemble plusieurs couches pour venir à bout de l'entreprise.
Le front se pose maintenant aussi sur le médium. À son tour, il perd ses couches en oignons, la peau fraîche s'expose et s'étend en une tache ovale de plus en plus sombre au milieu de l'os frontal. Celui-ci, étonnamment, ne met pas longtemps avant de paraître: un disque clair humide, duquel un sang clair perle.
Change de papier.
Le nez disparaît, enfin. Il est agréable de frotter les lèvres sur le papier, elles offrent une résistance molle, s'accrochant tantôt en haut, tantôt en bas, alors que la tête berce fort. Les gencives, malheureusement, ternissent cette impression par une trop généreuse quantité de liquide, les glandes salivaires voulant envelopper maladroitement les saignements.
Une dent casse. Le lobe frontal rend un son rêche.
Change de papier. Les efforts se consacrent davantage sur le front, il devient impératif de voir les méninges, d'en apprécier le frottement sur la feuille de sable pulvérisé.
Et au prix d'efforts, celles-ci apparaissent, tissu non pas gris mais rouge vif, comme un ectoplasme. Le lobe frontal étend ses frontières, et le cerveau sur le papier donne l'impression de nettoyer la rue avec une serpillière. Comme les lèvres, il se détache en fils grossiers, suivant avec délai le mouvement sur la feuille. Certains morceaux tombent par terre.
Change de papier.
Les prochaines étapes sont moins intéressantes. Il s'agit de râper jusqu'aux oreilles à présent, mais la tête est maintenant indéfinissable. C'est plutôt une coupe de viande biseautée en voie d'être complètement dissoute, car il ne faut jamais renoncer, quoi qu'il arrive."
Je ne te comprends pas mais je m'ennuie quand même, Val. Beaucoup. À défaut d'avoir du mal-être, j'ai cette haine étrange que je commande, mais elle me laisse toujours mélancolique et en travers de moi-même. Reste que, ça défoule.
RépondreSupprimerJ'ose croire que nous sommes semblables. Cette présomption m'anime.
Je cherche tes lèvres dans le noir.