26.3.09

1173. Les Essais libres

Non, je ne me vante de rien. En fait, j'ai toujours prôné l'humilité, dans toutes les mesures possibles, profitant de la présence d'autrui pour tirer le meilleur parti de l'existence, comme la majorité des humains, sans doute.

Au fond, nous nous excitons de ces moments d'exemplarité plurielle, quand c'est la fibre d'intérêt qui se manifeste, celle qui excite. Quand le coeur bat plus fort, quand je cours après l'ambiance, j'aime me considérer comme à l'aise. En ce moment, je suis à l'aise. Je suis tout seul, comme quand quiconque écrit pour lui-même: faire une telle chose avec de la compagnie serait impropre. Je sens que l'ennui est dans l'ampoule à décantation, qu'il se sépare par lourdes phases dégradées, et au compte goutte l'ampoule renvoie l'ennui brut, noir, sous formes de mots. C'est ainsi que l'écriture me permet de me sentir bien, en bout de ligne. J'ai de longues expirations, un bon signe, puisque je sens qu'enfin je réalise quelque chose d'utile, de précis.

J'ai connu quelqu'un qui savait bien paraître à travers les autres. J'euphémise: il avait de la commisération, il sourait toujours, il était le bon ami des filles (à ne souhaiter à personne). Chose surprenante, il écrivait, aussi. De sa compagnie tant aimable, on pouvait espérer des textes légers, or il s'agissait esentiellement de remises en question, de malheurs, de quêtes. Sa prose jurant sur sa personne, on n'en faisait pas des grands cas, certains sont même allés jusqu'à s'en moquer, car oui, lui, il élaguait toute son âme dans toutes les tribunes cathodiques, tout le monde pouvait le lire, mais en chair il était toujours si souriant, si canin qu'on ne pouvait pas faire autrement que de mélodramatiser sa pauvre plume. Ou de lui offrir un pitié toute féminine, ce qui, semble-t-il, est bien pire. C'est là une source d'angoisse.

Sur mon écritoire, je pisse mon laxisme, comme lui. C'est une bonne chose, j'espère de cette manière créer une fonction constructive de mes états moraux, et atteindre la fin d'un décompte lancé à des fins thérapeutiques. Je ne crois pas qu'il soit utile que cette démarche soit connue. Il me semble que l'exercice est si personnel, si intrinsèque qu'il ne doit impliquer personne. En propre, c'est mon décompte personnel que j'amorce, une accumulation de textes que je tiendrai sur ma tête, en équilibre, jusqu'à ce que je me déchire en deux. Selon mon rythme d'écriture et la teneur de ce décompte, j'espère me rendre à 80 ans.

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